LA RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN (2002)

L’intitulé de mon intervention suppose que je précise ce que l’on doit entendre par responsabilité pénale du médecin.

Tout d’abord il convient de la distinguer de la responsabilité civile et de la responsabilité disciplinaire ou ordinale.

La première notion consiste en une action diligentée par le patient par devant la juridiction civile afin d’obtenir d’une part la reconnaissance de l’erreur fautive du soignant pour ensuite solliciter du juge une réparation pécuniaire.

La responsabilité disciplinaire quant à elle est conduite soit par le patient, qui la plupart du temps n’est pas considéré comme partie à la procédure, soit par l’Ordre Professionnel ou encore un confrère devant le Conseil de l’Ordre siégeant en matière disciplinaire.

Cette procédure est ouverte dans la seule hypothèse où il est reproché au médecin de s’affranchir de ses règles déontologiques. La sanction prononcée ne saurait être pécuniaire mais répressive à savoir l’avertissement, le blâme, la suspension d’activité ou encore la radiation.

La responsabilité pénale, qui nous intéresse plus particulièrement, se caractérise par la sanction qui sera prononcée contre un médecin qui aura dans le cadre de sa fonction commis une infraction prévue dans le Code Pénal.

Cette responsabilité qui une fois reconnue par l’une des juridictions répressives soumettra le mis en cause à une sanction vindicative qui consiste en une peine d’emprisonnement et/ou/ à une amende.

Il est clair que la responsabilité pénale est de loin la plus crainte par le médecin et pour cause.

D’une part, elle jette en pâture un professionnel, souvent consciencieux et éprouvé par l’expérience, à la vindicte populaire.

D’autre part, elle sanctionne directement et souvent lourdement le médecin qui se trouve être cruellement isolé face à ses juges avec pour corollaire la quasi certitude de connaître des difficultés professionnelles irréparables.

La question que se pose légitimement tout médecin est la suivante : Quelles sont les situations dans lesquelles je cours un risque pénal ?

La réponse est à la fois simple et inquiétante. La plupart des actes de soins expose le médecin à une responsabilité pénale. Ceci est vrai dans la mesure où l’objet de son action est l’être humain dans son intégrité physique ou encore dans sa dignité.

Autant de raisons qui doivent conduire le médecin à inscrire son intervention dans un rapport risque/efficacité.

Il conviendra de considérer sommairement la notion de faute pénale avant d’envisager plus longuement les infractions de droit commun mais aussi plus spécifiques à l’exercice médical.


I/ LES ELEMENTS CONSTITUTIFS

En matière pénale, de la même façon qu’en matière civile, il faut examiner la faute, le dommage et le lien de causalité. Cependant, la responsabilité pénale obéit a des impératifs différents et un système juridique autonome.


1/ La faute

La faute pénale se distingue de la faute civile dans la mesure où il ne saurait exister de responsabilité sans faute.

En effet, la responsabilité, contrairement à la matière civile, ne procède pas du dommage mais de la faute limitativement énumérée et précisément définie par les textes.

Trois principales typologies de fautes peuvent être envisagées :

- Les fautes par commission (acte positif)
- Les fautes par omission : c’est l’abstention, la négligence, l’inattention
- Les fautes par manquement ou violation d’une obligation de prudence ou de sécurité définie par la loi ou les règlements.

La responsabilité pénale du médecin pourra être engagée soit lorsqu’il est directement auteur du dommage soit lorsqu’il a crée la situation dans laquelle le dommage s’est réalisé, en méconnaissant volontairement des règles de prudence. (loi 10 Juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels).

Le juge pénal saisi aura la lourde tâche, avant toute sanction, de qualifier quelle est la nature de la faute reprochée au médecin.

Nonobstant cette obligation de qualification qui tient le juge c’est l’appréciation des faits qui constitue la principale difficulté.

En effet, c’est au juge de déterminer à partir de quand il y a un comportement imprudent, une négligence ou encore une inattention. Il ne faut jamais perdre de vue que cette détermination est présidée par le principe du pouvoir d’appréciation souverain du juge qui statue selon son intime conviction.

En France, dans cette terrible tâche le juge pénal adopte la même méthodologie que le juge civil, à savoir l’appréciation « in abstracto » des faits, c’est à dire en évaluant le médecin en cause au regard du « bon médecin » ou encore le « médecin normalement diligent » qui doit donner des soins attentifs et conformes aux données acquises de la science médicale.

Une méthode qui pour nombre de médecins relève de l’équilibrisme intellectuel dont l’efficacité reste sujette à caution.

Cependant, il ne doit faire aucun doute sur le fait que le juge pénal appréciera la faute selon la situation qui supposera l’appréciation des moyens mis au service du médecin en cause mais aussi les conditions de son intervention.


2/ Le dommage

Le dommage pénal comme en matière civile est un élément constitutif de l’infraction.

Cependant, à la différence de la responsabilité civile qui envisage le dommage comme un préjudice actuel ou encore éventuel (une perte de chance) réparable, le dommage pénal ne peut procéder que d’un préjudice corporel, certain et actuel.

La victime doit être une personne née et qui a vécu. Ainsi, il n’y a pas d’homicide volontaire ou involontaire lorsqu’il s’agit d’un fœtus ou d’un embryon.

L’évaluation de la gravité du dommage aura une conséquence déterminante car elle permettra de fixer la juridiction compétente et la sanction appropriée.


3/ Le lien de causalité

Il s’agit de la dernière démonstration à établir à savoir la relation de cause à effet entre le comportement fautif et le dommage.

En matière pénale il n’y a pas de place pour les probabilités, la responsabilité ne pourra être engagée que s’il est établi qu’il y a bien une faute légale un dommage et un lien de causalité certain.

C’est sur ce terrain que de nombreuses relaxes sont prononcées. Alors même que l’acte médical est qualifié de fautif et qu’une atteinte corporelle ou encore un décès sont bien identifiés, il est de la plus grande difficulté que d’affirmer avec certitude que sans le comportement fautif le dommage invoqué aurait été évité.

Or, en matière pénale, il n’y a pas lieu d’envisager un préjudice éventuelle ou la notion de perte de chance.

Cet obstacle n’interdit pas pour autant le patient, après une relaxe ou un non lieu, de rebondir devant les juridictions civiles afin de faire admettre l’« étrange » lien de causalité permettant de rechercher la responsabilité du médecin au regard d’un dommage éventuel.

Pour conclure le volet consacré aux éléments constitutifs de la faute pénale, je ne peux occulter les conditions de la responsabilité pénale au sein de l’équipe médicale.

La France fait cohabiter deux principes.

Le premier est légal et consiste à l’individualisation de la responsabilité pénale. Cette dernière ne peut être que personnelle. En conséquence, l’idée d’une responsabilité collective et donc diluée est totalement exclue.

Le second principe est jurisprudentiel et consacre le principe d’une responsabilité cumulée. En fait il n’est pas rare de relever qu’une action pénale est dirigée à l’encontre de plusieurs intervenants. Il pourra s’agir d’un chirurgien, de l’anesthésiste, de l’infirmière du bloc opératoire et pourquoi pas du Directeur de l’établissement à qui l’on reprochera de ne pas avoir mis les moyens nécessaires à la réalisation du geste litigieux.

Dans l’hypothèse où chacun des intervenants aurait, par un comportement plus ou moins fautif, concouru à la réalisation du dommage, dès lors il appartiendra au juge pour un dommage unique de qualifier les fautes personnelles et de sanctionner l’ensemble des acteurs selon leur participation dans la réalisation du préjudice final.


II/ LES FAUTES PENALES DE DROIT COMMUN

Le législateur a envisagé une protection globale de l’intégrité corporelle, par le biais du Code Civil, du Code déontologie médicale, du Code pénal et le cas échéant du Code de la santé publique.

Plus particulièrement la France pose le principe absolu de l’intangibilité du corps humain, rappelé par plusieurs principes :

La primauté de la personne
L’interdiction de toute atteinte à la dignité de la personne
Le respect de l’être humain.

Ce principe ne pouvant souffrir que d’une dérogation à savoir l’atteinte ayant un dessein thérapeutique (article 16 du Code Pénal) et dans la limite où l’intervention est dépourvue d’un risque injustifié (art. 40 C Deont).

De surcroît toute intervention est impérativement subordonnée au principe du consentement libre et éclairé du patient.

C’est à la lumière de ce principe que le médecin devra esquiver autant que faire ce peut le risque pénal qui le guette au détour de tout acte volontairement ou involontairement attentatoire.


1/ L’atteinte volontaire à l’intégrité physique


Il s’agit pour l’essentiel des infractions suivantes :

- Les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner
- Les violences volontaires ayant entraîné une ITT
- Les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente
- L’administration de substances nuisibles
- L’homicide volontaire
- La non assistance à personne en danger

Ces infractions entraînant des sanctions variables selon la gravité du dommage ou encore la situation de la victime.

En effet, le fait que la victime soit un mineur de moins de quinze ans, une femme enceinte ou encore un e personne dite « vulnérable » en raison de son âge ou de son état de santé (physique ou psychique), constitue une circonstance aggravante.

Nous pourrons constater que chacune de ces infractions a été éprouvée au contact de l’art médical.

Concernant l’administration de substance nuisible, il est admis qu’il s’agit là d’une atteinte volontaire à l’intégrité de la personne dès lors qu’elle a eu pour conséquence de porter à l’intégrité physique ou psychique d’une tierce personne.

Il y a lieu de ne pas commettre de confusion avec le crime d’empoisonnement qui consiste au « fait d’attenter à la vie d’autrui par l’emploi ou l’administration de substances de nature à entraîner la mort »

L’application concrète de cette infraction nous rappelle au drame qu’a connu la France avec l’affaire du sang contaminé.

En effet, les médecins en cause, sans vouloir la mort des hémophiles, se sont abstenus de faire cesser l’usage des produits sanguins dangereux ; dès lors l’infraction est constituée.

La question de l’applicabilité de cette infraction peut être, par ailleurs, légitimement posée dans plusieurs hypothèses :

L’administration excessive de produits médicamenteux ayant pour conséquence de plonger le patient dans un comas (Cass 10 05 1972)

La remise à la victime, en vue de leur absorption, de médicaments susceptibles d’entraîner son décès. (ex : la morphine dans la prise en charge de la douleur)

Le transsexualisme soulève une difficulté éthique évidente mais aussi une terrible casuistique pour le juriste au regard de la violence entraînant une mutilation ou une infirmité permanente.

En effet, comment concilier cette pratique médicale au regard du code pénal ?

Nombreuses ont été les décisions de justice qui ont posé le principe selon lequel l’intervention chirurgicale correctrice sur un transsexuel sans but thérapeutique, engage la responsabilité pénale du chef de coups et blessures volontaires entraînant une mutilation.

Quand y a t’il un objectif thérapeutique ?

Notre Cour de Cassation en admettant, pour les transsexuels la possibilité de modifier leur état civil a affirmé implicitement le caractère licite de ce type d’intervention chirurgicale. ( Cass. Ass pleinière 11.12.1992)

Cependant, on pourrait légitiment penser qu’en admettant le principe de la chirurgie non thérapeutique à visée purement esthétique, il devient aujourd’hui difficile de résister, prétextant une éthique hypocrite, au rapprochement des jurisprudences en cette matière.

Concernant l’acte de violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner je pourrais illustrer le délit par un cas d’espèce sanctionné par une juridiction pénale.

Il s’agissait d’un médecin qui, alors qu’il pratiquait un avortement illégal (6 mois) à la demande de sa patiente celle ci a été victime d’une péritonite généralisée causant son décès.

Quant à la violence médicale volontaire, il est admis que celle-ci est constituée lorsque l’acte médical est non consenti ou encore illégal.

l’histoire médicale nous rappelle des heures sombres où il n’était pas rare de rencontrer des expérimentations médicales pratiquées dans l’ignorance du patient ou encore des stérilisations systématiques réalisées dans le secret de la prise en charge institutionnelle psychiatrique.

Cependant, il est essentiel de garder à l’esprit que l’acte de soins dépourvu d’une visée thérapeutique constitue sans équivoque un acte de violence sanctionné par les tribunaux répressifs.


L’homicide volontaire soulève la délicate question de l’accompagnement du patient à la mort.

L’euthanasie, définie comme étant la bonne mort douce et naturelle, doit elle être considérée comme un crime odieux ou encore comme l’acte ultime d’humanisme que le médecin peut offrir à son patient ?

Le soin doit-il se concevoir comme la lutte acharnée de l’homme contre ses démons et notamment la mort justifiant une surenchère technique déshumanisée, ou encore comme l’art de soulager l’homme des maux qui affectent la vie et finalement les conditions de la mort ?

La justice quant a elle peut se montrer comme l’épée de Charlemagne, longue, froide et tranchante.

En effet, est considéré comme un assassinat le fait pour une infirmière de provoquer délibérément la mort d’une patiente en phase terminale, par une injection médicamenteuse ou encore en augmentant délibérément la posologie du traitement.

Néanmoins, l’esprit d’humanisme a fait son chemin jusque dans les prétoires car est consacrée la distinction entre l’euthanasie active et l’euthanasie passive. et ce par le truchement d’une périlleuse gymnastique intellectuelle

La première consistant en un acte positif à savoir l’administration d’un produit entraînant la mort.

La seconde consistant à l’interruption d’une prescription ou d’une technique dont la vocation est de maintenir en vie.

L’intérêt de la distinction réside bien entendu dans la portée de la sanction, puisque la dernière acception est seulement constitutive d’un délit et non plus d’un crime.

Enfin parmi les infractions volontaires il y a l’infraction par omission, à savoir le délit de non assistance à personne en danger.

Cette infraction rappelle les dispositions du Code de déontologie lequel précise « Le fait de porter l’assistance ou les soins nécessaires à un malade ou à un blessé en péril rentre dans les devoirs généraux des médecins ».

Par ailleurs, cette obligation s’inscrit aussi dans l’obligation déontologique relative à la continuité des soins, ainsi le médecin est tenu, en situation d’urgence, d’apporter ses soins à un mineur en dépit du consentement des parents.

Ladite infraction étant constituée lorsque le patient présente un péril, c’est à dire un état dangereux pour sa personne, que le médecin a conscience du péril.

La limite de l’intervention consiste au péril que pourrait représenter l’intervention sur le médecin lui même ou sur autrui.

Cette limite pose la question de l’intervention sur un patient présentant un accès de violence extrême ou encore contaminé par une infection extrêmement contagieuse.


2/ L’atteinte involontaire à l’intégrité physique

Bien que les infractions involontaires sont celles qui frappent le plus souvent le corps médical, mon étude sera ici très sommaire dans la mesure où juridiquement elle ne pose pas de réelles difficultés.
Comme dans les atteintes volontaires, l’atteinte involontaire à l’intégrité physique pourra conduire au décès ou encore à une incapacité physique ou psychique.

En effet, les infractions d’homicide et de blessures involontaires sont des infractions de même nature qui ne différent que par leurs conséquences.

Le fait générateur de l’infraction tient à un comportement qui ne sera pas considéré comme conforme à celui que l’on est en droit d’attendre d’un médecin normalement diligent.

L’anormalité de l’acte de soins sera le fait de la :

- Maladresse
- Imprudence
- Inattention
- Négligence
- Inobservation des règlements
- La responsabilité pénale du médecin est engagée dès lors que le médecin est directement auteur du dommage, ou dès qu’il a créé la situation dans laquelle le dommage s’est réalisé en méconnaissance des règles de prudence (L. 10 juillet 2000)

Autant d’éléments qu’il appartiendra à la victime de prouver.

Notons que le Droit Français permet à la victime d’une atteinte à l’intégrité physique d’engager la responsabilité pénale d’une personne morale, en l’occurrence une clinique ou un hôpital dans la mesure où celui-ci aurait manqué délibérément à une règle de sécurité et de prudence.

Que cette responsabilité n’exclut nullement la responsabilité personnelle si celle-ci est établie.

Dans la mesure où chaque geste médical porte une atteinte à l’intégrité physique, il est aisé de comprendre que l’exercice de votre profession vous expose de façon permanente aux foudres de la justice pénale.

Seule l’extrême vigilance, la parfaite actualisation des connaissances mais aussi la maîtrise toujours plus précise de la réglementation en matière de sécurité sanitaire permettra à l’homme de l’art d’exercer dans une relative sécurité et sérénité.

Pour illustrer mon propos, je vous propose d’aborder à partir de cas d’espèces quelques situations ayant fait l’objet d’une sanction pénale.


Concernant l’homicide involontaire il s’agira :

- Cass.Crim. 10 janvier 2001 : Suite au décès d'un enfant 48 heures après sa naissance, un gynécologue accoucheur a été déclaré coupable d'homicide involontaire par la Cour d'appel de Versailles. En effet, la mère de l'enfant étant une parturiente à risque, et les difficultés de l'accouchement lui ayant été signalées, le praticien aurait commis des négligences justifiant sa condamnation

- Cass.Crim., 28 novembre 2000 : Un patient admis aux urgences est décédé d'une défaillance cardiaque suite à des interventions ayant causé des pertes de sang importantes. Le chef de service, qui n'avait pas participé aux interventions, a néanmoins été condamné en appel pour homicide involontaire.

- Cour de Cassation, Assemblée Plénière, 30 mai 1986: La surveillance postopératoire d'un patient ayant subi une amygdalectomie n'a pu être assurée que par une infirmière, du fait du départ de la clinique du chirurgien et de l'anesthésiste. Le malade est décédé des suites d'un arrêt cardio-respiratoire survenu quelques instants seulement après l'intervention.

- Cass.Crim., 19 septembre 2000 : Un psychiatre ayant administré à un patient, décédé par la suite d'un syndrome occlusif avec colite nécrosante, une dose massive de neuroleptiques (pouvant causer une constipation avec risque d'occlusion) a été condamné pour homicide involontaire. En effet, le patient souffrait déjà d'une constipation significative. En outre, le praticien n'a pas donné les instructions nécessaires à son équipe.

A été soumis à la Cour de Cassation le délicat problème de l’homicide involontaire du fœtus. Dans cette hypothèse pourrait on retenir la responsabilité pénale du médecin ?
La Cour a considéré (Ass. plein 29 juin 2001) « Le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte de la loi pénale, s’oppose à ce que l’incrimination prévue par l’article 221-6 du Code pénale, réprimant l’homicide involontaire d’autrui, soit étendue au cas de l’enfant à naître dont le régime juridique relève de textes particuliers sur l’embryon et le fœtus ».


Concernant les blessures involontaires :

- Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 octobre 1979 : Lors d'une intervention, un chirurgien a oublié une pince hémostatique dans l'abdomen de sa patiente. La cause de ses douleurs postopératoires n'a été découverte que quatre années après l'opération., Suite à l'extraction de l'objet, la patiente a été en état d'incapacité totale de travail pendant plus de trois mois

- Cass.Crim., 9 janvier 1992 : le 15 septembre 1981, Mme Mann a donné naissance à l'enfant Céline dans une clinique où le docteur H. exerce les fonctions de gynécologie-accoucheur. L'enfant a dû être hospitalisé pour des souffrances néonatales et plaie du scalp, après réanimation. Un handicap moteur grave a été diagnostiqué. Le médecin est poursuivi du chef de blessures involontaires en raison du retard dans son intervention, alors que la sage-femme avait plusieurs fois demandé au médecin de venir consulter la patiente.

- Cass. Crim., 17 octobre 2000 : En l’espèce le prévenu, chirurgie, a été condamné du chef de blessures involontaires par imprudence. Après des interventions de chirurgie urinaire pratiquées par ce chirurgien, le patient, qui souffrait de coliques néphrétiques, a du subir l’ablation d’un rein, entraînant une incapacité supérieure à trois mois. Les juges du fond ont reproché au prévenu d’avoir commis une erreur dans ses choix thérapeutiques, une faute de négligence.


III/ LES FAUTES PENALES SPECIFIQUES


1/ La violation du secret professionnel

Le secret professionnel est certainement l’une des questions juridiques qui préoccupent le plus les médecins.

Le secret professionnel s’impose à tout médecin et ce dans l’intérêt du patient. Il couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession : ce qui lui a été confié, ce qu’il a vu, ce qu’il a entendu ou compris.

L’information couverte par le secret est médicale et extra-médicale.

Elle lie le médecin au delà du décès de son patient.

Il appartient au praticien de veiller à ce que les personnes qui l’assistent respectent leurs obligations en matière de secret professionnel.

Il est crucial de souligner que le secret ne peut être opposable au patient. Cependant, lorsque la révélation de l’information risque d’être préjudiciable à l’efficacité du protocole de soins, le médecin peut alors exercer un droit de rétention.

Le principe du secret médical est conçu comme général et absolu ; dès lors, hormis où la loi en dispose autrement, il est absolument impensable de s’en affranchir.

Cependant, il convient de noter que la jurisprudence en la matière a considérablement aménagé le caractère absolu du secret eu égard au développement de la médecine collective et de la socialisation des soins.


2/ L’exercice illégal de la médecine

Les pouvoirs publics, au nom des exigences de Santé Publique, ont dû réserver l’exercice de la pratique médicale à des professionnels qualifiés. (défaut de diplôme ou diplôme étranger dépourvu d’équivalence)

Par ailleurs, le médecin ne peut pas, sauf circonstances exceptionnelles, entreprendre des soins dans des domaines qui dépassent leurs compétences.

Enfin, tout médecin qui apporte son concours à des personnes n’ayant pas les attributions légales pour effectuer des actes médicaux, se rend complice et encourt donc les peines relatives à l’exercice illégal de la médecine.

Le délit d’exercice illégal de la médecine est constitué lorsque il est établi, que les actes sont accomplis habituellement ou par direction suivie ; le délit suppose donc la répétition, ou la persistance dans la durée.

Les sanctions applicables sont les suivantes :

Sanctions pénales (amende + emprisonnement)
Sanctions Complémentaires  : interdiction temporaire ou définitive d’exercer


3/ l’établissement de faux certificats et de fausses déclarations

Cette infraction pénale consiste en l’établissement d’un certificat médical ou d’une attestation dont le contenu est matériellement inexact.

L’infraction est subordonnée à la production d’un écrit. Ainsi, une information inexacte formulée oralement ne peut faire l’objet d’une sanction pénale.

L’infraction est constituée, selon la jurisprudence, dès que le médecin qui établit une attestation en faveur d’un tiers, sait que les faits qu’il a certifié sont matériellement inexacts. Peu importe de l’usage qui sera fait de l’attestation litigieuse.

Cas d’espèce fréquent : Le fait pour un médecin d’établir un faux certificat attestant de troubles physiques ou psychiques d’un patient afin de favoriser la tierce personne dans sa procédure de divorce.


4/ Le compérage

Le compérage s’entend comme l’entente contraire à la déontologie entre membres de certaines professions libérales.

Ainsi, tout compérage entre pharmacien et médecins, membres des autres professions de santé est interdit.

Exemples :

- Il y a compérage dès lors qu’une convention permet à un non médecin de recevoir la totalité ou une quote-part des honoraires ou des bénéfices provenant de l’activité professionnelle d’un membre d’une des professions médicales.

- Est, interdite toute convention d’après laquelle un pharmacien assure à un médecin praticien, à un chirurgien dentiste ou à une sage femme un bénéfice d’une nature quelconque sur la vente de produits pharmaceutiques que ceux peuvent vendre.

Il s’agit, en fait, d’ententes frauduleuses.

© Jean-Charles SCOTTI

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